SCULPTER LE VIDE
« En tournant autour d’une sculpture de Pistacio notre regard y pénètre.
D’abord attirés par le graphisme élégant et mouvant que ses lignes dessinent dans l’espace, il apparaît que nous ne nous y arrêtons pas, mais qu’il nous mène malgré nous, par la dynamique de sa construction, en un lieu inconnu, ouvrant en nous une énergie dont le flux libère toute tension. Ce lieu serait-il celui de notre non savoir ? Le sculpteur travaillerait ainsi le vide, cet entre-deux de la ligne, comme la matière d’un fluide qui doublerait le volume par l’étonnante et vigoureuse vitalité de son mouvement, et qui, traversant la forme, la déploierait ainsi dans l’infini des possibles en une circulation qui permet de s’y mouvoir en sorte qu’aucune adhérence ni aucun obstacle ne vienne s’opposer au libre chemin de l’imaginaire. Serait-ce ainsi que sa sculpture pense ?
“ Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre ” , intimait Socrate. La sculpture devient chez Pistacio cette expérience d’une pensée spatiale, ou plus encore cosmique, qui se doit de n’être ni fantaisiste ni pur hasard, mais savant et précis exercice d’équilibre des vides. Car l’art du sculpteur semble nous désigner, en ce double du monde qu’il nous révèle en contre-forme, cet autre chemin qui est celui de la pensée, lorsqu’examinant la puissance de la lumière décrivant la forme par celle de son ombre, il nous conduit à une plus grande sensibilité à notre présence au monde, mais également à une plus grande intelligibilité de nos moyens de la penser, par l’expérience faite en ce cheminement, de notre ignorance des forces qui nous traversent et nous émeuvent. »
Evelyne Artaud, Commissaire de l’exposition.
Vue de l’exposition « Anima / Animal »,
Abbaye royale de Saint-Riquier, 2015.
Pascal Pistacio emprunte ses formes au primitivisme ; en cela son travail pourrait être rapproché de l’art pariétal. Les visages sont complètement absents de l’ensemble de son oeuvre et pourtant chaque pièce est dotée d’une expressivité. C’est qu’elle part toujours d’une vérité organique, animée par un souffle que l’artiste lui insuffle.
La méthode n’en est pas moins singulière : à partir d’une structure métallique, qui constitue le squelette de la pièce, le plâtre, savamment travaillé, donne matière aux oeuvres. Le fer et le plâtre peuvent aussi être associés à d’autres matériaux. L’atelier est ainsi rempli d’entassements de bois, coquillages, bouchons, plastiques, tissus, cartons en tout genre… autant d’objets récupérés, recyclés, détournés et qui disparaissent ensuite sous l’épaisseur des bandes plâtrées.
Les poissons sont un emblème de la vitalité et de la fécondité. Cette symbolique est renforcée par leur couleur rouge sang. Ayant précédé l’homme sur la Terre, ils témoignent des secrets de l’évolution. Mais ici, ils sont présentés sans vie, disposés comme sur les séchoirs à poissons d’Islande ou de Norvège.
Suspendus comme à des crocs de boucher, ces poissons revisitent la thématique des carcasses et boeufs écorchés peints par Rembrandt, Soutine, Chagall, et tant d’autres à travers l’histoire de l’art.
M.L.
« Les Témoins de Leucade », 2014.
Structure métallique, plâtre peint,
toile de jute, bois, cire à cacheter,
140 x 200 x 40 cm.
L’oeuvre convoque le singe, symbole des origines de l’humanité. Le singe imite-t-il l’homme, ou l’homme voudrait-il imiter le singe pour retrouver les clés du « monde » d’avant la conscience ?
L’artiste questionne ici la nature de l’animal et celle de l’homme,
les liens entre art et argent et force à s’interroger sur l’ère capitalistique où l’argent virtuel est roi ; où démesure rime avec surproduction.
« Monkey Money », 2015.
Structure métallique, plâtre peint, carton,
tablette numérique,
475 x 400 x 300 cm.
Vues de l’exposition dans les jardins à la française au Château d’Auvers-sur-Oise, 2014.
« J’ai tout vu », 2010.
Structure métallique, plâtre peint et laine,
350 x 200 x 30 cm.
« Tout bien réfléchi », série « Les Céphalaires », 2011.
Structure métallique, plâtre peint,
204 x 93 x 148 cm.
Collection Château d’Auvers-sur-Oise.
« Ibis roi », 2013.
Structure métallique, plâtre peint,
182 x 27 x 106 cm.
« L’Hercynien », 2009.
Structure métallique, plâtre peint,
203 x 90 x 69 cm.
Hercynien qualifie, en géologie, tout ce qui a trait à la période carbonifère de l’ère primaire « ou ère des Poissons » et les plissements géologiques qui en sont nés. Cette sculpture est le fruit d’un travail de synthèse de l’ensemble de ces caractéristiques géologiques : créature, mi-homme, miroche, semblant tout droit sortie des massifs hercyniens. Une marche vers l’avenir.
Vues de l’exposition « Derrière la porte… », Hôtel de Monthiers, Pontoise, 2013.
Avec le peintre Vincent Corpet.
« Le Vigier de Montauban », 2013.
Structure métallique, plâtre peint,
295 x 120 x 15 cm.
« Je suis prêt », 2008.
Structure métallique, plâtre peint,
200 x 70 x 59 cm.
« Été », série « Les Huertita(s) », 2012.
Structure métallique, plâtre peint,
175 x 70 x 44 cm.
Collection particulière.
« La Primipare enjouée », 2009.
Structure métallique, plâtre peint,
130 x 65 x 44 cm.
« Enveloppée », série « Dames », 2009.
Structure métallique, plâtre peint,
32 x 15 x 15 cm.
Collection particulière.
« Enceinte », série « Dames », 2011.
Bronze [2012], tirage 1/8,
Fonderie Chapon,
17 x 15 x 12 cm.
Collection particulière.